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Rôle de la perception tactile dans le processus de création en protohistoire

Coordinatrice : H. Procopiou (UMR 7041 ArScAn)
Partenaire 2 : Laboratoire de Tribologie et Dynamique des Systèmes (UMR 5513)– École Centrale de Lyon (Responsable H. Zahouani)
Participants de l’UMR
Athina Boleti
Argyris Fassoulas
Elise Morero
Nathalie Thomas


Ce projet vise à analyser le rôle de la perception tactile durant la création des produits artisanaux protohistoriques. Si dans le monde occidental depuis la Renaissance le toucher occupe le rang le plus bas dans l’échelle des sens, il est au cœur de l’univers sensoriel antique. La réalisation des objets manufacturés, selon Aristote, n’est que l’expression de notre croyance en la solidité de la matière et en la véracité du toucher (Œuvres Morales, I, 34, 1197a, 4-13) tandis que l’acuité tactile est signe de l’intelligence (De l’âme II, 9, 421a 19-26). Nos travaux sur les techniques de polissage protohistoriques dans les Cyclades, fondée sur une analyse pluridisciplinaire des états de surfaces qui a associé la tribologie (Sciences de l’usure, du frottement et de la lubrification) et l’archéologie, nous ont conduits à avancer que les artisans protohistoriques mobilisaient des critères haptiques pour apprécier le degré de lissage des objets et que le processus d’apprentissage et de transmission mobilisait des habiletés sensorielles (Procopiou et. al. 2011). En tirant profit d’une méthodologie que nous avons déjà élaborée et testée, nous souhaitons à présent élargir notre terrain d’étude à d’autres contextes archéologiques mais aussi à des contextes ethnographiques. En Inde (Mahâbalipuram, Tamil Nadu), par exemple, un artisanat lapidaire traditionnel, aujourd’hui menacé par la mécanisation des procédés techniques, subsiste encore (Fig. 1). A travers ces applications, nous tenterons d’une part de tracer l’évolution de la perception tactile et de son rôle dans la création, d’autre part de mettre en évidence des constantes transculturelles, liées aux habiletés et aux processus cognitifs mobilisés par les créateurs. Ce travail souhaite ainsi contribuer à réhabiliter la transmission des savoirs par le toucher qui, longtemps délaissée dans les systèmes éducatifs occidentaux, commence à être reconsidérée grâce à des travaux de psychologie cognitive. Il souhaite aussi revitaliser des techniques de finition aujourd’hui disparues, qui, comme en témoignent les objets archéologiques, produisent des polis qui n’ont rien à envier aux polis industriels actuels, tout en utilisant des abrasifs naturels respectueux de l’environnement. Il vise enfin à un renouvellement muséographique en proposant une découverte sensorielle des œuvres par le public, à travers la manipulation de reproductions d’objets archéologiques et par la mise en place d’une borne interactive à écran tactile (Fig. 2).
Fig1
Fig.1 : polissage manuel et appréciation tactile des surfaces à Mahâbalipuram, Inde (Tamil Nadu) (Mission septembre 2011)
Fig2
Fig.2 : prototype de la tablette de découverte sensorielle


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