Les zones refuges sahariennes à l’Holocène

Les zones refuges sahariennes à l’Holocène

Pays et régions concernés : Mauritanie (Hodh), Égypte (Gilf el-Kebir)
Une équipe pluridisciplinaire a été constituée dans la prolongation du projet Néma (Mauritanie), et d’un projet de recherches dans la région du Gilf el-Kebir (Égypte), débutés respectivement en 2001 et en 2006. Elle comprend des archéologues, archéozoologues, géologues environnementalistes et biogéochimistes du matériel osseux. Les objectifs essentiels du projet « Zones refuges sahariennes à l’Holocène » sont de mieux comprendre les réponses des populations confrontées à un changement climatique allant vers l’aridification actuelle du Sahara. En effet, l’aridification progressive du climat en régions sahariennes a eu pour conséquence, outre les mouvements de populations, d’entraîner de profondes modifications dans leur mode de vie. À la fin de l’optimum climatique du début de l’Holocène, les hommes, dispersés dans un paysage à l’origine comparable aux savanes, se sont regroupés dans des régions où l’eau, facteur de vie, était encore disponible : étendues lacustres, indirectement alimentées par l’eau des moussons venue du sud, et massifs montagneux. Ces environnements ont permis leur survie dans un milieu devenant ailleurs de plus en plus inhospitalier. Ces « zones refuges » sont étudiées en tant que « geo-écosystèmes » impliquant la prise en compte de tous les paramètres environnementaux (géomorphologie, climat, hydrologie, faune et flore naturelles) et de l’ensemble des interactions de ces éléments avec les populations humaines. Dans cette optique, les gravures et peintures rupestres contribuent à comprendre la façon dont l’homme s’est approprié la nature.
Une attention particulière sera portée à l’impact des ressources aquatiques sur le comportement et l’adaptation des ces sociétés néolithiques. Au Sahara Oriental, les recherches sur l’Holocène inférieur et moyen dans la région du plateau du Gilf el-Kebir visent notamment à éclairer un processus de néolithisation original en milieu semi-aride et, en particulier, les modalités de l’adoption du pastoralisme. Au Sahara occidental, dans la région des falaises (Dhar) de Tichitt à Néma (Mauritanie), le Néolithique voit, parmi le développement d’innovations, celle d’une agriculture autochtone. Ces changements environnementaux et culturels s’enregistrent dans les habitudes alimentaires des hommes, abordées par deux méthodes indépendantes : d’une part, l’archéozoologie et, d’autre part, la biogéochimie des ossements humains. Pour le matériel osseux, il est en outre nécessaire d’étudier sa conservation (transformations diagénétiques) pour pouvoir discuter de la validité des informations biogéochimiques obtenues et les confronter aux autres données des fouilles. Les recherches archéologiques et environnementales menées en ces deux régions sahariennes, géographiquement éloignées, permettront de constater s’il existe des invariants spécifiques à la néolithisation saharienne puisque ces populations, à l’origine de culture différentes, ont été soumises aux même contraintes face aux changements environnementaux globaux de l’Holocène saharien.


Habitat néolithique et station rupestre de Tounfrin (Dhar Néma, Mauritanie), © A. Person.


Le Wadi Abd el-Malik vu du sommet du plateau, Gilf el-Kebir (Égypte), © E. Honoré.

Quelques publications en rapport avec ce projet :

Amblard-Pison S., Vallette T., Jousse H., Albaret C., Person A. (2010) – Les gravures rupestres d’anthropomorphes du Dhar Néma (Mauritanie sud-Orientale). Afrique : Archéologie et Arts, n° 6, p. 67-84.

Amblard-Pison S. (2011) – Villages et territoires villageois néolithiques d’une zone refuge du Sahara méridional. In : Archéologie du territoire, de l’Égée au Sahara, G. Kourtessi-Philippakis et R. Treuil (sous la direction de -), Paris, Publications de la Sorbonne, p. 169-179, 5 fig.

Honoré E. (2012) – Peintures rupestres et cultures pastorales dans le Sahara Égyptien. In : Les images : regards sur les sociétés, C. Leduc, A. Salavert, T. Nicolas & T. Al Halabi. Archéo. Doct-3, Publications de la Sorbonne, Paris, p. 17-53.

Honoré E. (2013) – L’appropriation de la nature par l’homme au Sahara égyptien (Gilf el-Kebir) au cours de l’optimum holocène. Paris, Université de Paris I Panthéon-Sorbonne, thèse de doctorat, 449 p.

Person A., Amblard-Pison S., Jousse H., Vallette T., Albaret C., Raimbault M., Maurer A.-F. et Suire J. (2012) – Influence de l’environnement sur la gestion des ressources au Néolithique dans la zone-refuge du Dhar Néma (Mauritanie sud-orientale). Journal of African Archaeology, vol. 10 (2), p. 133-164.

Vallette T., Amblard-Pison S., Albaret C., Jousse H. et Person A. (2009) – Les groupements de pièces lithiques peuvent-ils être des indices de modes de vie des sociétés néolithiques ? Le cas du Dhar Néma (Mauritanie sud-orientale) du second au premier millénaire. In : S. Magnavita, L. Koté, P. Breunig et O. A. Idé (eds), « Crossroad/Carrefour Sahel. Cultural and technological developments in first millenium BC/AD West Africa ». Frankfurt am Main, Magna Verlag, Journal of African Archaeology Monograph Series, vol. 2, p. 3-13.