Les prospections et le processus de peuplement dans les archipels

Responsable :
Dominique Legoupil, directrice de recherches – UMR 7041 ARSCAN – CNRS
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Les prospections et le processus de peuplement dans les archipels

Plusieurs campagnes de prospection ont été effectuées : dans la mer d’Otway (1981), l’archipel du Cap Horn et l’île Navarino (1991), la mer de Skyring (1992 et 1993), l’île Madre de Dios (2000), le sud de Chiloé, le golfe Almirante Montt et le seno Ultima Esperanza (2003), l’île Stuven (2005), et l’île Dawson (2007). Plus d’une centaine de sites ont été découverts. Les sondages nous ont permis d’observer le mode de peuplement des archipels, d’approcher certaines caractéristiques régionales des implantations humaines, et d’aborder les pratiques funéraires, notamment en grotte, des Indiens canoeros.

Le processus de peuplement des archipels est fondé sur une navigation côtière à vue qui ne nécessitait aucune connaissance de l’astronomie, contrairement à la navigation dans les îles du Pacifique. De toute évidence primaient une bonne expérience des conditions météorologiques et des courants marins et une sérieuse connaissance des caractéristiques physiques des côtes et des ressources exploitables. Ainsi, dans l’extrême sud (île Navarino et archipel du Cap Horn), terme ultime de la progression de l’homme vers les hautes latitudes antarctiques, on a pu observer une dynamique de peuplement fondée sur une progression rayonnante effectuée à partir de camps de base situés dans les baies riches en mollusques qui fournissaient une ressource abondante et facilement prédictive. A partir de ces camps, utilisés de manière répétée mais en aucun cas sédentaire, étaient exploitées progressivement les diverses niches écologiques de la région, aux ressources plus aléatoires comme les oiseaux ; et ce, jusqu’à ce qu’une baie plus favorable permette l’implantation d’un nouveau camp de base et la découverte d’un nouveau territoire (Legoupil 1995). Ce schéma et les difficultés représentées par certaines traversées particulièrement exposées expliquent le peuplement relativement tardif, vers le début de notre ère, des îles les plus extérieures et les plus isolées comme l’île des Etats et l’archipel du Cap Horn (fig. 2).


Figure 2. Par beau temps, les populations installées depuis 6000 ans dans le seno Grandi, sur l’île Navarino, pouvaient sans doute distinguer au loin l’archipel du Cap Horn. Elles attendront quatre millénaires pour franchir le dernier pas, vers le début de notre ère.